Courrier de la FEETS-FO à la Ministre sur le Nouveau Dispositif Scientifique et Technique
Madame la Ministre
Depuis plusieurs mois maintenant, une concertation se déroule tambour battant entre votre cabinet et les organisations syndicales du MEDDTL au sujet d’un nouveau dispositif scientifique et technique.
Dans la perspective de cette réorganisation conséquente et à la hâte du réseau scientifique et technique -reconnu par tous comme un bien commun de la Nation- force est de constater qu’il est fréquemment question des relations à entretenir et même à développer avec les collectivités locales sans que ces dernières ne soient encore partie prenante des discussions.
D’après les positions tout récemment dévoilées et que votre cabinet et l’administration tentent d’imposer, ce projet s’oriente vers une fusion des CETE, du CERTU, du CETMEF et du SETRA dans un unique établissement public administratif (EPA), au seul motif qu’il serait plus simple d’associer à sa gouvernance les collectivités locales.
Si leur participation est si importante, pourquoi n’ont-elles pas été associées plus tôt à cette concertation ?
D’un point de vue juridique, statutaire et législatif, la création d’un tel établissement public (EP) pose par ailleurs un certain nombre de questions complexes et rédhibitoires, preuve s’il en est besoin, que ce choix n’a rien de naturel.
Sachant d’une part que la dénomination EPA n’est pas considérée comme une catégorie d’EP, à quelle catégorie rattacher ce futur organisme sans que ce dernier ne soit placé en concurrence directe avec d’autres EPs existants, actuellement partenaires des services concernés ?
La création précipitée d’un EP empêcherait d’autre part d’associer dès le démarrage les collectivités locales à sa gouvernance et imposerait une période de transition dont on ignore la durée.
Or actuellement, pour qu’un EP puisse exercer des activités pour compte de tiers en évitant des procédures de mise en concurrence, la seule jurisprudence existante donne un seuil de 10%. Même si ce seuil peut ne pas être considéré comme la ligne rouge à ne pas dépasser, qui s’apprête à jouer les apprentis juristes avec l’avenir de 3500 (trois mille cinq cents !) agents dévoués au service public ?
Vous vous êtes engagée devant l’ensemble des agents des services concernés sur l’absence de mobilité forcée.
Or, M. le secrétaire d’État au logement a cyniquement affirmé lors du dernier comité technique ministériel (tout comme votre directeur de cabinet adjoint et votre conseiller social au cours de la concertation) que si des sites venaient à être fermés, le fait de ne pas imposer à un agent de prendre un poste sur un autre site désigné suffirait à ce que cela ne soit pas considéré comme une mobilité forcée, l’agent restant livré à lui-même … sous la menace de la loi mobilité.
Dans ces conditions, comment croire à d’éventuelles garanties sur le maintien des implantations territoriales et des répartitions thématiques sur le long terme, condition nécessaire à une réelle connaissance pluridisciplinaire des territoires et qui fait actuellement la force du réseau au service de l’État et des collectivités locales ?
Quel avenir pour des agents à la merci du directeur du futur EP qui, à tout moment, serait en mesure de décider de la fermeture d’une antenne ou du regroupement des agents par thématique sur un unique site, sur le seul motif de la rentabilité ?
Quel avenir pour l’égalité républicaine d’accès au service public ?
L’ensemble des services concernés sort d’une longue période de réorganisation (plan d’évolution des CETE entre 2008 et 2011, réorganisation du CERTU et du CETMEF, délocalisation et restructuration du SETRA).
Ces services ont donc besoin d’une certaine stabilité pour se reconstruire et éprouver le fonctionnement de la nouvelle organisation adoptée.
Il paraît donc très dangereux de modifier à nouveau fondamentalement le fonctionnement de ces services sans accuser de nouvelles pertes d’effectifs et de compétences, surtout avec le maintien actuel de ce climat d’incertitude.
Les exemples récents de situations similaires dans ce ministère sont nombreux et édifiants (DDE/DDEA-DDT, DRE-DIREN-DRIRE/DREAL, délocalisation du SETRA, etc…)
Enfin, la création d’un aussi important établissement dont une grande partie des services support a récemment été mutualisée avec d’autres services de l’État va créer des contraintes fortes sur ces nouveaux centres supports mutualisés qui vont se voir privés d’ETP -voire d’agents- pour permettre au futur EP de fonctionner et a minima de payer ses agents dès sa création.
Compte tenu de la taille du futur organisme, cela représente plusieurs centaines d’agents.
Ces services support n’étant pas concernés par le périmètre de réflexion, leurs agents sont-ils concernés par votre engagement sur l’absence de mobilité forcée évoquée précédemment ?
Nous sommes conscients qu’il faut réformer le RST rapidement mais nous ne confondons pas vitesse et précipitation.
L’administration se doit de se donner le temps et les moyens de mener une réflexion complète et aboutie, notamment en associant dès à présent les collectivités locales.
Dans cette attente, nous vous prions d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de notre haute considération.
Le Secrétaire général
Jean Hédou