Lettre du Secrétaire Général n°269
« Si les premiers éléments pouvaient laisser entendre que l’horizon se dégageait et que le beau
temps allait être de retour, nous voyons se profiler l’annonce d’un nombre de grains impressionnant… »
LETTRE DU SECRETAIRE GENERAL
Numéro 269
_ Paris, le 23 juillet 2012
LE CALME AVANT LA TEMPÊTE ?
Depuis la mise en place du nouveau gouvernement et les tables rondes de la conférence sociale, les
annonces ne manquent pas sur les nouvelles dispositions prises pour l’instauration d’un dialogue social
rénové : il sera plus respectueux, les agents seront plus écoutés, les organisations syndicales seront de vrais
partenaires…
et de fait, certains éléments apparaissent de bon augure :
– les réorganisations marquent le pas, on nous promet une stabilisation des structures ;
_ depuis les rumeurs d’un nouveau calendrier pour la mise en place du CEREMA – le décalage d’un an semble
acté – et l’affichage d’une volonté d’équilibre entre DREAL et DDT, nous ressentons – enfin – une volonté
d’apaiser la valse des réorganisations. Les chantiers se réduisent, les services se stabilisent.
– la RGPP est remise formellement en cause ;
_ la RGPP semble aujourd’hui ne plus être qu’un mauvais souvenir du passé, et sur ce point, le SNITPECT-FO,
qui l’a longuement et très fortement combattue, pourrait s’en réjouir bruyamment.
– un dialogue social rénové ;
_ la conférence sociale, les diverses réunions de concertation, les entretiens avec les responsables politiques
ont laissé l’ensemble des syndicats plutôt satisfaits. Pour tous, le dialogue devient « normal »,
« respectueux », « positif »…
Et pourtant,
depuis le mois d’avril 2012, les agents ressentent un grand flottement. Dès le départ de Nathalie Kosciusko-
Morizet, qui entraîna la désintégration du cabinet, ainsi qu’un intérim plus ou moins suivi par le premier
ministre, le doute s’est installé chez les agents quant à la place de leur ministère, la priorité qui pouvait lui
être donnée, l’importance des missions confiées… où est le projet stratégique ministériel reconstructeur de
sens tant promis ? quelle suite aux grandes concertations interrégionales d’une journée où l’on a demandé
aux cadres d’être forces de proposition ?
Après les élections présidentielles, deux nouvelles ministres, du MEDDE et du METL, furent nommées…
hélas, l’une ne resta qu’un mois ! Juste le temps de suspendre le CEREMA, d’ailleurs toujours dans les limbes
de la non-décision. Les élections législatives furent l’occasion d’un nouveau changement, une nouvelle
ministre du MEDDE, cette fois, présente depuis un mois, mais sans que nous puissions y voir plus clair sur le
pilotage du ministère ! Son silence assourdissant laisse en effet songeur.
Le fameux « plus grand ministère du monde », censé s’occuper de l’avenir du pays – et du monde ! – au
travers des politiques de développement durable, de l’énergie et du climat, transatlantique transformé en
catamaran, serait il mis en cale sèche ?
Car, si les premiers éléments cités pouvaient laisser entendre que l’horizon se dégageait et que le beau
temps allait être de retour, nous voyons se profiler l’annonce d’un nombre de grains impressionnant :
– une nouvelle phase de décentralisation annoncée
_ Les débats sur une nouvelle phase de décentralisation ne sont pas encore officiellement menés, que bon
nombre d’acteurs, fonctionnaires, élus ou journalistes ont déjà lancé des conjectures sur le sujet. Et il est
clair, pour des ministères dont la plupart des missions relèvent déjà de compétences partagées avec les
collectivités territoriales, que l’impact d’une nouvelle phase de décentralisation sera très fort. On y verra
l’occasion de clarifier l’intervention de l’Etat dans certaines missions déjà décentralisées ou un prétexte pour
se désengager d’un certain nombre d’autres. L’avenir du CEREMA, pourtant, ne saurait y être lié.
– des baisses d’effectifs et de moyens drastiques (lettres de cadrage)
_ Nos ministères ne font pas partie, ce n’est un secret pour personne, de la liste des ministères prioritaires. Il
vont donc, par l’effet mécanique du maintien global des emplois au sein de la Fonction Publique de l’Etat et
l’augmentation des emplois dans les ministères prioritaires, perdre énormément d’effectifs. Au moins autant
que lors d’une phase RGPP « ancien modèle », peut-être plus. On évoque parfois, dans le secret des bureaux
parisiens, 9 non remplacements sur 10 départs à la retraite…
Les lettres de cadrage sont à cet effet sans appel. Les ministères non prioritaires doivent se partager les
efforts, et la baisse de 2,5 % annoncée n’est qu’une moyenne à atteindre pour l’ensemble. Selon les
capacités de nos ministères à obtenir des arbitrages positifs ou non, l’addition pourrait être plus salée et l’on
pourrait passer de l’océan arctique à… la mer morte !
Cette situation se détériorerait encore si les deux ministères (METL et MEDDE) décidaient de séparer leurs
plafonds d’emploi, hypothèse pour l’instant non démentie.
En termes de moyens, l’année 2012 est déjà à classer dans les « annus horribilis », avec une « impasse
budgétaire » (terme de l’administration) d’environ 22 M€, ce qui promet, pour la fin de l’année, des reports
de charge massifs sur 2013. Mais avec les baisses prévues pour l’année prochaine (7 %, puis 4 % en 2014,
et encore 4 % en 2015), et ces reports 2012, l’année 2013 risque tout simplement d’être l’année de la
banqueroute…
– vers une paupérisation des mesures catégorielles (divisées par deux)
_ Les lettres de cadrage sont également très claires sur les moyens financiers à accorder aux agents : le
maintien en « valeur » de la masse salariale imposera a minima la division par deux des enveloppes
catégorielles, déjà bien trop minces. Ainsi, le retour financier qui était prévu dans la RGPP se trouve diminué
d’autant. Quand on sait que ces mesures catégorielles sont un moyen d’une part de mettre en œuvre des
réformes statutaires ou de gestion, et d’autre part de redistribuer un peu d’augmentation salariale à des
d’agents dont le point d’indice est gelé depuis 2011 (sans vision sur un éventuel dégel), on peut penser que
cette décision sera très, très mal perçue par des agents toujours plus surchargés, pressés, déplacés.
L’équation apparaît donc très largement impossible : d’un côté des discours rassurants, voire lénifiants, de
l’autre des mesures drastiques, tant en effectifs qu’en salaires et moyens, et au final des réorganisations
quasi inéluctables en conséquence d’une nouvelle décentralisation. Ce qui entraînera bien évidemment des
déplacements et transferts d’agents, cette fois sans aucun moyen pour les accompagner.
Alors, pour quand la tempête ?
_ Je nous espère un bateau solide et des flots cléments …
Thierry Latger